Artisans : pas de réception des travaux, pas de garantie décennale !

Artisans : pas de réception des travaux, pas de garantie décennale !

Le client d’un artisan estime que ce dernier a commis une faute contractuelle. Ce que conteste ce dernier : la réception des travaux ayant eu lieu, c’est sa responsabilité décennale qui est mise en cause. Mais y a-t-il eu effectivement une réception des travaux ? Le doute est, en effet, permis au vu des faits…


Réception des travaux : elle ne doit pas être « équivoque » !

Pour mémoire, en matière de construction immobilière, avant la réception des travaux, le constructeur engage sa responsabilité contractuelle. Après la réception des travaux, il engage sa responsabilité au titre des garanties légales (garantie décennale, garantie biennale et garantie de parfait achèvement). L’action en justice est donc différente selon que la réception des travaux a eu lieu ou non.

Cette réception des travaux peut être expresse (elle résulte d’un écrit), tacite (il faut analyser les faits et le comportement des parties) ou judiciaire (le juge fixe lui-même une date de réception des travaux).

Il peut parfois être difficile, pour un artisan ou son client, d’identifier une réception tacite. Cette difficulté peut alors poser un problème au client de l’artisan : doit-il engager une action en justice au titre de la garantie contractuelle ou au titre d’une garantie légale (décennale, biennale ou de parfait achèvement) ?

Un artisan et son client ont rencontré cette difficulté. Voici leur histoire.

Un artisan est chargé de construire une maison, le client se réservant certains travaux. Mais des désordres apparaissent : le client estime alors que la responsabilité contractuelle de l’artisan est engagée puisque la réception des travaux n’a pas eu lieu…

… à tort, selon ce dernier : il rappelle que le client a pris possession de la maison et qu’il reste seulement 10 % du marché à payer. Pour lui, les critères de la réception tacite sont remplis.

Le client rétorque alors que la prise de possession de la maison est ici « équivoque », ce qui rend impossible la réception tacite des lieux : s’il a pris possession de la maison, c’est sous la contrainte, le seul endroit alternatif où il pouvait vivre étant un mobile-home.

En outre, après la prise de possession de la maison, il a dû quitter celle-ci, sur les recommandations d’un expert. Les risques d’effondrement de la maison à cause des désordres étaient, en effet, trop importants (les fondements de la maison sont instables et un fort coup de vent peut la faire s’effondrer).

Autant d’éléments qui amènent le juge à donner raison au client : il ne peut pas être considéré qu’il y a eu réception tacite des travaux, la prise de possession des lieux étant effectivement « équivoque ». Le client a donc eu raison d’engager une action en justice au titre de la responsabilité contractuelle de l’artisan.

Source : Arrêt de la Cour de cassation, 3ème chambre civile, du 25 janvier 2018, n° 16-25520

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