Action en requalification du CDD en CDI : « après l’heure, c’est plus l’heure ! »

Action en requalification du CDD en CDI : « après l’heure, c’est plus l’heure ! »

Une entreprise emploie un salarié en CDD, pour divers motifs, depuis 10 ans. Mais le salarié constate que son 1er contrat ne mentionne pas le motif du recours au CDD. De quoi obtenir la requalification du CDD en CDI, selon le salarié… « Non, trop tard ! », selon l’employeur…


Requalification du CDD en CDI : quel délai pour agir ?

Une entreprise conclut plusieurs CDD successifs avec un même salarié pendant 10 ans. Quelques jours avant la fin de son dernier contrat de travail, le salarié saisit le juge pour demander la requalification de ses CDD en CDI, parce qu’il a constaté que son 1er contrat ne mentionne pas le motif de recours au CDD.

« Trop tard ! », selon l’employeur qui rappelle qu’il ne pouvait agir, à l’époque, que pendant un délai de 2 ans à compter de la conclusion du contrat irrégulier. « Non », répond le salarié : ce délai d’action (appelé « délai de prescription ») ne court qu’à compter de la fin du terme du dernier CDD. Et, considère-t-il, parce que son dernier CDD n’a pas encore expiré, son action est bel et bien possible.

« Non », répond à son tour le juge : le délai de prescription applicable dans le cas d’une requalification d’un CDD en CDI, fondée sur l’absence d’une mention au contrat susceptible d’entraîner sa requalification, court à compter de la conclusion de ce contrat. L’action du salarié est donc, ici, trop tardive.

Cette décision soulève néanmoins des interrogations : le point de départ du délai de prescription sera-t-il systématiquement fixé au jour de la conclusion du CDD contesté ? Aucune solution tranchée ne permet de l’affirmer : cette décision semble, en effet, ne reposer que sur l’absence d’une mention obligatoire dans le CDD, mais il n’est pas sûr qu’elle puisse s’étendre à d’autres cas de requalification (poursuite du CDD après son terme, par exemple).

Par ailleurs, cette décision interpelle aussi sur la durée de prescription elle-même : rappelons qu’en matière sociale, il existe 3 principaux délais de prescription :

  • 1 an pour les actions portant sur la rupture d’un contrat de travail (depuis les ordonnances Macron du 22 septembre 2017) ;
  • 2 ans pour les actions portant sur l’exécution d’un contrat de travail ;
  • 3 ans pour les actions portant sur le paiement du salaire.

La question du délai actuel de prescription de l’action en requalification du CDD en CDI est d’une particulière importance :

  • si le salarié souhaite obtenir, à la suite de la requalification du CDD en CDI, des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le délai de prescription à respecter « pourrait » éventuellement être d’1 an ;
  • si le salarié souhaite obtenir, à la suite de la requalification du CDD en CDI, un rappel de salaire pour les périodes situées entre 2 contrats, par exemple, le délai de prescription à respecter « pourrait » éventuellement être de 3 ans.

Ces questions ne sont pas fermement tranchées à ce jour. N’hésitez donc pas à vous enquérir de l’avis de votre conseil, le cas échéant.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 3 mai 2018, n° 16-26437

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